Fabrice Grinda : il a valorisé une start-up à plus de cent millions !

Posté mar 05/10/1999 - 00:00
Par admin

Le groupe Arnault a acheté Aucland à partir des chiffres d'affaires à réaliser dans trois ou quatre ans et sur la base d'un développement mondial fort sur le créneau des enchères sur Internet.

Un nouveau sommet pour la France en matière de start-up : 115 millions de francs pour la majorité du capital d' /www.aucland.fr">Aucland, société fondée il y a à peine six mois! C'est l'investissement colossal que vient de faire le groupe Arnault (LVMH), par le biais de sa filiale Europe@web, en valorisant à très haut niveau Aucland, une entreprise spécialisée dans les enchères sur Internet et lancée en avril 1999 à Sophia Antipolis par deux Azuréens, Sacha Fosse-Parisis et Philippe Grinda (24 ans).C'est aussi le vent de la Silicon Valley qui souffle de plus en plus fort sur la Telecom Valley. En juin dernier, déjà, deux start-ups sophipolitaines avaient été rachetées : Odisei, pour 70 millions de francs, par l'Américain 8 X 8; puis SIP, pour 60 millions de francs, par une filiale de Myris, un géant anglais des logiciels spécialisés dans la finance. Cette fois, sans atteindre encore les galactiques montants américains (cela se chiffre parfois en milliard de dollars!), les sommes en jeu ont poussé d'un cran, dépassant les 100 millions de francs. Du jamais vu en France!Entre Milan, Paris, Londres et Madrid, Fabrice Grinda, le PDG explique le coup d'éclat d'Aucland et la stratégie suivie.Il avait été dit que vous aviez levé 30 millions de francs aux Etats-Unis avant de lancer Aucland à Sophia Antipolis. Ce nouvel investissement vient-il s'ajouter à cette première somme ? Fabrice Grinda :Non car le groupe Arnault a investi à la place des Américains. C'est une longue histoire. Elle a commencé en juillet 98, avec 5 millions de francs que nous avions apportés, avant la création de la société pour lancer les études. Nous étions en train de lever 30 millions de francs auprès de capitaux risqueurs américains. Mais l'affaire a pris un peu de retard. Elle devait se finaliser en avril ou mai 1999 et se trouvait reportée en juillet. A cette époque nous avions déjà 25 employés et étions devenus le premier site français d'enchères sur Internet. Les offres commençaient alors à se précipiter. Nos partenaires américains n'ont pas voulu suivre en augmentation de valorisation. Le 15 juillet nous avons signé une lettre d'intention avec le groupe Arnault, intention qui s'est concrétisée dans le courant de la semaine dernière par la signature d'un contrat.Quel est votre chiffre d'affaires actuel ? Et comment a-t-on pu valoriser autant une si jeune société? Fabrice Grinda :La valorisation est justifiée par les chiffres d'affaires que nous réaliserons dans deux, trois ou quatre ans et sur la base d'un développement fort. Notre métier est de servir d'intermédiaire entre les acheteurs et les vendeurs. Actuellement nous faisons 2 millions de ventes par mois. La dessus nous prenons 3% de commission et touchons 1 F à la mise en vente de chaque objet. Il y a actuellement sur le site 26.000 objets en vente. Tous les jours 2.000 objets sont mis en ligne et il se vend quotidiennement 100 objets à un prix moyen de 300 F. Ce qui génère un revenu de l'ordre de 5.000F par jour.Mais laissez-moi envisager un monde dans trois ans, quand Internet sera aussi utilisé en Europe qu'il l'est actuellement aux Etats-Unis. Que 4 millions d'objets seront en vente sur le site avec, qu'il se vendra chaque jour 300.000 objets et que le chiffre d'affaires quotidien attendra les 3,5 millions de francs. Cela n'est pas du rêve : ce sont les chiffres actuels d'eBay aux Etats Unis.La raison pour laquelle nous avons levé autant d'argent c'est que les batailles d'Internet se gagnent aujourd'hui et qu'il faut frapper un grand coup pour gagner. Il faut savoir que chaque million de francs que vous investissez aujourd'hui (la moitié en frais de structure, l'autre moitié en publicité) c'est un million de francs de plus que le concurrent va devoir dépenser pour entrer sur le marché.Arnauld avait la vision de voir grand. Il a pris plus de la moitié du capital pour démontrer qu'Aucland serait le cheval de bataille des enchères en Europe et que la société deviendrait un site de référence pour les enchères européennes.Vous avez désormais les moyens d'une stratégie offensive. Qu'allez-vous faire? Fabrice Grinda :Notre première étape était de nous imposer en France. C'est fait. Nous avons aussi déjà commencé la seconde étape : l'internationalisation. Une équipe de 15 a 20 personnes se trouve en Angleterre, en Italie et en Espagne. Nous lançons l'Angleterre mercredi 13 octobre; puis nous ouvrirons un site en Italie et en Espagne dans les deux semaines suivantes. Nous sommes déjà latino américain. Nous avons lancé le premier site argentin le 15 août et ouvrons dans les semaines qui viennent le Mexique, le Brésil et le reste de l'Amérique latine.A l'origine, en avril 1999, nous étions quatre. Aujourd'hui, nous sommes soixante. Nous serons plus de cent à la fin de l'année. Notre plan est aussi de continuer à compléter notre offre. Nous avons développé ainsi un site d'enchère personnel : n'importe qui possédant une page personnelle sur Internet peut intégrer un site d'enchère gratuitement (nous offrons la partie logicielle). Mais en contrepartie les objets seront directement sur Aucland et le site personnel. L'internaute augmente la possibilité de vendre et dispose de la partie logicielle pour ouvrir le site à ses couleurs; de notre côté nous augmentons notre audience.Allez-vous rester sur Sophia Antipolis ? Fabrice Grinda :Nous allons déménager prochainement. Mais nous restons sur la technopole. Quand nous avons pris les bureaux de 120 m2 aux Taissounières, nous ne pensions pas pouvoir les remplir rapidement. Aujourd'hui nous sommes à 25 dans ces bureaux ! Ce n'est plus possible. Nous allons doubler, voire tripler la surface.Nous avions choisi Sophia Antipolis parce que nous sommes originaires de la région et qu'il y a les écoles : nous avons notamment recruté des ingénieurs informatiques à l'ESSI (Ecole supérieure en sciences informatiques) et des responsables de marketing au Ceram.Ce qui pourrait être fait pour nous aider ? Simplifier les réglementations pour les créations d'entreprises, et les créations d'emplois. S'il n'y avait pas de charges sociales, nous aurions trois fois plus d'employés. Sur Sophia, aussi, ce qui nous manque le plus, ce sont des choses de base : des restaurants ouverts la nuit ou le week-end. Impossible de commander une pizza, un hamburger : personne ne livre la nuit. Or, dans une start-up, les gens travaillent plus que 35 heures...'

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