Regard franco-américain sur l'éducation : votre état d'esprit est-il fixe ou en développement?

Posté ven 14/11/2014 - 09:28
Par admin

Sandrine et Maxime Crener, dans leur chronique hebdomadaire "Regard franco-américain sur l'éducation" restent cette semaine sur la question de l'apprentissage. Sous le titre " Notre état d’esprit: fixe ou en développement ?", ils montrent, à travers les travaux de Carol Dwec, professeur de psychologie à Stanford, que l'intelligence n'est pas une donnée innée, fixe, mais qu'elle peut se développer et que l'état d'esprit reste le vrai déterminant de la réussite. A lire pour éviter de rester cloué par son code génétique!

Maxime Crener a dirigé le Ceram à Sophia et développé l'Université Internationale de Monaco. Son épouse, Sandrine, est Research Associate à la Harvard Business School. Tous deux, installés depuis cinq ans à Boston, ont gardé un pied sur la Côte d'Azur. Ils sont aussi souvent appelés par des amis azuréens ou monégasques inquiets pour l'avenir de leurs enfants. D'où l'idée de cette rubrique hebdomadaire sur les problèmes actuels de l'éducation avec un point de vue posé des deux côtés de l'Atlantique. Cette semaine ils restent dans le domaine de l'apprentissage qu'ils avaient abordé la semaine dernière à travers la question de "L'adolescence : l'âge de toutes les opportunités". Voici leur texte (les intertitres sont de la Rédaction).

Notre état d’esprit: fixe ou en développement ?

Il y a quelques mois un ami de New York, suite à une discussion sur les apprentissages, nous rappela comment le Proviseur du Lycée Français, Sean Lynch, introduisait dans son blog une notion passionnante : l’"état d’esprit de développement de soi" qu’il faisait partager à ses élèves et à leurs parents. C’est aux travaux de Carol Dweck, célèbre professeur de psychologie à Stanford ("mindset"/état d’esprit évoqué dans la note précédente) que fait référence Lynch. Ils s’inscrivent en complément des recherches de Steinberg que nous avons exposé la semaine dernière, et qui conditionnent tellement la réussite des jeunes !

Ceux qui possèdent un état d’esprit fixe et ceux qui possèdent un état d’esprit de développement

Dweck nous dit que l’état d’esprit que les enfants acquièrent à travers leur éducation familiale et scolaire est divisé en deux groupes : ceux qui possèdent un état d’esprit fixe et ceux qui possèdent un état d’esprit de développement. A partir de cette différence qui semble toute simple, Carol Dweck montre en fait que les capacités et le talent ne suffisent pas à expliquer la performance (aussi bien académique que sportive ou professionnelle), mais que notre état d’esprit est le vrai déterminant de la réussite.

Ainsi, ceux qui pensent que leur intelligence est une donnée innée, fixe, et que leur potentiel ne changera pas, sont les adeptes de l’état d’esprit fixe. Par contre, ceux qui jugent que peu importe leur niveau d’intelligence ou de performance actuel il est possible de l’améliorer, sont les partisans d’un état d’esprit de développement.

Les personnes ayant un état d’esprit fixe ont des a priori limitatifs sur leurs capacités, ils ont un capital-qualités qu’ils ne pensent pas pouvoir changer, il vient avec la naissance. Celles qui possèdent un état d’esprit de développement sont des personnes positives pour lesquelles toute expérience est une occasion d’apprendre. Le premier concept cultive les qualités personnelles intrinsèques comme des avantages acquis tandis que le deuxième concept s’attache surtout à la croyance en l’effort pour les acquérir.

"La bosse des mathématiques est un mythe"

Les travaux successifs de Carol Dweck montrent bien que les aptitudes et habilités que l’on possède peuvent être développées. Elle prouve que l’effort, l’entrainement, et le travail demeurent les facteurs principaux de la performance. Par exemple, la bosse des mathématiques est un mythe, et tous les jeunes peuvent les apprendre et réussir ! Elle a exposé de surcroit que faire des éloges sur l’intelligence plutôt que sur les efforts s’avère anti-productif et sape la motivation des jeunes.

Par exemple, si un élève reçoit une bonne note a l’un de ses devoirs, il est plus judicieux de dire "tu as une bonne note parce que tu as beaucoup travaillé ou révisé", plutôt que de commenter "bravo tu es doué dans cette matière". Et inversement devant un échec : "visiblement tu n’as pas assez travaillé et si tu faisais plus d’efforts dans le futur tu pourrais t’améliorer" au lieu de : "encore une mauvaise note ! Pas étonnant tu n’es pas fort dans cette matière !"

Eviter le trop de louanges

Quand les élèves et les professeurs ont un état d’esprit de développement, ils comprennent que l’intelligence peut se développer. Ainsi ils s’occupent de l’amélioration de celle-ci au lieu de rester admiratif sur leur propre intelligence. Les études récentes sur l’effort en psychologie cognitive et en neuroscience montrent que lorsqu’il y a chez les jeunes un accroissement dans la densité des connexions neuronales dans le cerveau, il y a un accroissement du résultat du test QI chez ces mêmes jeunes et que l’inverse est valable ! Le Professeur Dweck signale également que la louange souvent répétée peut être un facteur qui réduit l’effort  "je suis intelligent donc pourquoi travailler davantage" or l’effort est une variable de contrôle que possède l’élève pour aller vers le succès.

Dès lors, devant l’échec il ne doit pas lâcher prise mais au contraire persister. La persistance n’est pas simplement un acte de foi conscient mais également un mécanisme inconscient qui agit sur le cerveau. Les études récentes sur le cortex préfrontal dévoilent que cette persistance agit comme un interrupteur qui contrôle le centre de récompense du cerveau. Quand il est actif, il dicte au cerveau de ne pas s’arrêter d’essayer !

"L'état d'esprit n'est pas inné, il s'apprend!"

Les élèves qui ont un état d’esprit de développement vont faire ainsi l’effort de continuer à apprendre en augmentant par ailleurs leur motivation et leur volonté de réussir. Pour eux, toute expérience est l’occasion de progresser et le défi est constant : ils ont confiance en leur capacité à apprendre et à s’améliorer. Pour eux tout est possible, ils vont exploiter leur potentiel au maximum. Ces élèves sont plus heureux, voient la vie de façon plus positive et ne sont pas cloués au sol par leur code génétique ! La bonne nouvelle dans tout cela c’est que l’état d’esprit n’est pas inné mais s’apprend !

Pour plus de détails lire le livre de Carol Dweck "Mindset, the New Psychology of Succes", Random House, 2006, USA ou bien sa traduction en français par un jeune chercheur, Jean-Baptiste Dayez, de l’Université Catholique de Louvain, "Changer d’état d’esprit : une nouvelle psychologie de la réussite" aux Editions Mardaga, 2010, Avenue Pasteur 6, Bat. H, Belgique-1300 Wavre.

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