
Toni Servillo dans le rôle d'un écrivain désabusé dans "La Grande Bellezza" (DR)
Après avoir remporté le Prix du Jury en 2008 au Festival de Cannes avec Il Divo, Paolo Sorrentino était reparti bredouille de La Croisette et avait plutôt déçu il y a deux ans avec This must be the place, un film tourné aux Etats-Unis avec Sean Penn. Cette année, il revient en pleine forme avec La GrandeBellezza qui marque ses retrouvailles avec l’Italie et avec son acteur fétiche Toni Servillo qui campe le rôle de Jep Gambardella, un écrivain qui remporta un prix littéraire important dans sa jeunesse mais qui ne retrouva plus jamais l’inspiration et se reconvertit dans le journalisme. Bel homme au charme irrésistible malgré les premiers signes de la vieillesse, il est de toutes les mondanités de la ville où son esprit fait merveille et sa compagnie recherchée. Dans son appartement et sur son immense terrasse qui domine Rome, il organise lui-même des fêtes où se joue la comédie du néant. Traversé par les souvenirs d’un amour de jeunesse, il va poser un regard d’une amère lucidité sur le monde qui l’entoure et commencer à s’interroger sur lui-même et sa vie décadente dans une ville, Rome, dont l’aveuglante beauté a quelque chose de paralysant.

L’ombre de Fellini plane sur La Grande Bellezza
La Grande Bellezza est d’ailleurs un hommage appuyé à la ville éternelle et les références sont nombreuses à La DolceVita ou à Roma de Federico Fellini. Son ombre plane sur le film même si Paolo Sorrentino n’a surtout pas cherché à l’imiter, mais a plutôt voulu puiser chez le maître du cinéma italien, une source d’inspiration. Sorrentino apporte d’ailleurs sa touche personnelle au film avec son cortège de visions folles servies par une photo époustouflante. La caméra virevolte en suivant Jep Gambardella qui avance dans la vie avec une nonchalance affectée au milieu de fêtes romaines excentriques ponctuées de performances artistiques étranges comme celle de cette petite fille qui jette des pots de peinture sur une toile géante pour en faire un tableau devant une foule ébahie. Sorrentino porte un regard désabusé sur l’Italie post-Berlusconi en pleine déconfiture culturelle et morale. Un pays où la pauvreté est aussi autre que matérielle. Tout comme son héros, le cinéaste semble à la poursuite d’une chimère et à la recherche de l’idéal insaisissable qui donne son titre au film. Avec La GrandeBellezza, il semble l’avoir en partie trouvé et, en tout cas, son retour en Italie lui a fait le plus grand bien. Ce retour sera-t-il aussi gagnant au Festival de Cannes ? Réponse dimanche soir avec la proclamation du palmarès.