Découverte à Sophia : la spadine, une nouvelle arme contre la dépression

Posté lun 10/05/2010 - 16:40
Par admin

Pour tous ceux qui souffrent de dépression, la "maladie du siècle", la découverte que viennent d'annoncer des chercheurs de l’Institut de Pharmacologie Moléculaire et Cellulaire (IPMC) de Sophia Antipolis pourrait être capitale. Ils ont identifié en effet un peptide, qu’ils ont appelé spadine, à effets antidépresseurs (AD). Ce peptide est issu d’une séquence endogène correspondant à une protéine appelée sortiline. C'est à partir de sa nature peptidique que la spadine ouvre de nouvelles voies pour la synthèse d’antidépresseurs à effet beaucoup plus rapides que ceux qui sont actuellement en usage.

 

Un antidépresseur peut être efficace très rapidement

 

Cette découverte des chercheurs sophipolitains a permis de mettre en évidence qu’un antidépresseur pouvait être efficace très rapidement. Ainsi, les effets de la spadine sont sensibles, notamment au niveau de la neurogenèse (synthèse de nouveaux neurones) dès 4 jours de traitement contre 15 à 21 jours pour les antidépresseurs classiques. Ces travaux multidisciplinaires coordonnés par Catherine Heurteaux, Jean Mazella et Marc Borsotto à l’IPMC ont mis à contribution pas moins de 8 équipes de recherche à Sophia Antipolis, Montréal (Canada), Lyon et Bordeaux. Ils ont été publiés en avril dans la revue Plos Biology et ont fait l'objet d'un dépôt de brevet européen.

 

La dépression, problème majeur de santé publique

 

La dépression est un problème majeur de santé publique. En effet, dans les pays industrialisés 4 à 10% de la population sont ou seront affectés par une forme sévère de la maladie et une personne sur cinq souffre ou souffrira de dépression, sévère ou légère. Les traitements par les antidépresseurs (AD) ne sont efficaces que dans deux cas sur trois, mais seuls 40% des patients présentent une rémission complète. La recherche de nouvelles voies thérapeutiques, cibles ou molécules, est donc cruciale.

 

Historiquement, le traitement de la dépression a été révolutionné par la découverte, il y a 50 ans environ, de deux classes de molécules à vertus antidépressives, les tricycliques, inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (norepinephrine, NE) et les inhibiteurs de la monoamine oxidase (IMAO), bloqueurs du catabolisme des monoamines.

 

Aujourd’hui, les inhibiteurs sélectifs de la recapture de sérotonine (SSRI) sont les AD les plus utilisés. Malgré une efficacité certaine, beaucoup (trop) de patients ne répondent pas à ce traitement. De plus leur effet retard (2 à 3 semaines de traitement) représente également un inconvénient majeur. Par conséquent, la mise au point d'un traitement qui s’affranchirait de ces inconvénients représente un grand espoir à la fois pour les patients et les thérapeutes.  

 

Dans la lignée des travaux sur les canaux ioniques

 

Ces travaux sont dans le fil de la recherche sur l’activité des canaux ioniques engagés à l'IPMC par le professeur Michel Ladzunsky (un canal ionique est un micro générateur qui crée des signaux électriques par lesquels les cellules nerveuses communiquent entre elles). En 2006, ses équipes avaient notamment identifié TREK-1, un gène impliqué dans la dépression. Il s'est révélé aussi de plus en plus évident que l'activité de ces canaux ioniques dépendait de leurs environnements lipidiques et protéiques et que les protéines partenaires jouaient un rôle crucial dans leur régulation.

 

C’est en recherchant ce type de partenaire que Marc Borsotto de l’équipe de C. Heurteaux, en collaboration étroite avec Jean Mazella, s’est intéressé à la sortiline ou récepteur 3 à la neurotensine (NTSR3). Ils ont ainsi identifié la spadine, un peptide de 17 aminoacides. Les résultats obtenus dans tous les tests animaux utilisés démontrent que la spadine se comporte comme un antidépresseur. Elle semble d'autre part spécifique de la dépression car elle n’a aucun effet sur des tests comportementaux liés à l’anxiété. Elle augmente significativement la transmission sérotoninergique dans le système nerveux central.

 

Un antidépresseur mais également un "marqueur biologique de la dépression"

 

A court terme, le dosage du taux plasmatique de spadine chez des patients sera entrepris et permettra sans doute d'établir la corrélation entre le taux de spadine et la gravité de l’état dépressif. "Grâce à cette méthode de dosage et grâce à ses propriétés AD, nous espérons dans un avenir proche utiliser la spadine non seulement comme antidépresseur mais aussi comme marqueur biologique de la dépression", ont déclaré les auteurs. Ces travaux ont été financés par le Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) et la Fondation pour la Recherche Médicale (FRM).

 

+d'infos

www.cnrs.fr/cote-azur

 

 

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