Nice-Paris Orly : la colère impuissante

Posté mar 22/04/2003 - 00:00
Par admin

La restriction de la concurrence et la remontée vertigineuse des tarifs sur Paris-Orly menace l'économie de la Côte d'Azur. Tourisme comme high tech. Mais le fait semble accompli. La "low cost" easyJet, qui ouvre trois Nice-Orly le 3 juin, et la CCI comptent en dernier recours sur les instances européennes.

C'est le problème nouveau le plus grave auquel se trouve confrontée l'économie azuréenne : celui de la diminution du nombre de sièges et de l'augmentation brutale et vertigineuse des tarifs de la liaison aérienne Nice-Paris Orly. Une remontée qui a suivi, de façon instantanée, l'arrêt des vols d'Air Lib. Seul sur la ligne d'Orly depuis le début de février, Air France a remonté en flèche sa "recette par siège" tandis que ses taux de remplissage effectuaient un joli bond. Le jackpot ! Auparavant, ceux qui voyagent pour des raisons professionnelles pouvaient faire l'aller-retour Nice-Paris Orly autour de 100 euros. Désormais, hors abonnement, difficile d'échapper au tarif maximum de 440 euros TTC en classe économique et de plus de 600 euros en classe affaires.La colère des usagers exprimée lors de la réunion de la Chambre de commerceSi Air France continue de proposer des tarifs évasion Nice-Paris Orly à 80 euros TTC, ceux-ci sont en nombre plus restreints d'une part, et surtout d'autre part il faut réserver 30 jours à l'avance et passer la nuit de samedi à dimanche sur place. Pas pratique évidemment pour des voyages d'affaires. Sans compter les effets du "surbooking" et d'annulation de vols. Ainsi, plusieurs témoignages ont été recueillis de passagers qui avaient payé pourtant "plein pot" et qui, le vol au départ d'Orly ayant été annulé, ont transité par Roissy CDG, ce qui allongeait d'autant le temps du voyage.Autant dire que la colère des usagers professionnels n'a pas manqué de s'exprimer la semaine dernière, lors de la réunion organisée au centre d'affaires de l'aéroport par la CCI NCA. La Côte d'Azur, enclavée, sans TGV comme Marseille, vit essentiellement de ses liaisons aériennes. L'aéroport est son véritable coeur et la liaison avec Paris sa plus grosse artère. Une artère qui se trouve rétrécie brutalement par la folle augmentation des tarifs réellement payés et la réduction de sièges. Les effets s'en sont fait sentir immédiatement. Air Lib avait 34% du trafic sur Orly. Air France en a bien récupéré une partie. Mais, du même coup, les chiffres de la ligne Nice-Paris Orly ont plongé et témoignent de la perte globale de clientèle : -22% en février et –23% en mars !A moyen terme, ces effets risquent d'être beaucoup plus destructeurs. Comme l'a souligné lors de la réunion le sénateur Laffitte, l'affaire du Nice-Orly est désastreuse en terme d'aménagement du territoire. Les entreprises risquent notamment d'être découragées de s'implanter sur la technopole en raison du prix de la liaison avec Paris. Quant aux professionnels du tourisme d'affaires, ils s'inquiètent des "retombées négatives" de la flambée des tarifs sur les salons et manifestations professionnelles de la Côte.easyJet ouvre le 3 juin ses Nice-Orly et va en référer à l'EuropeReste que la centaine de participants est repartie frustrée. Francis Perugini, président de la CCI, s'est bien montré décidé de faire un recours contre la décision du Cohor et d'aller jusqu'à la Cour européenne de justice. Les politiques présents, dont Christian Estrosi, vice-président du Conseil général, s'associeront à une campagne de lobbying auprès des pouvoirs publics. Mais le représentant du Cohor, l'organisme qui a procédé à la distribution des "slots" (créneaux horaires de décollage ou d'atterrissage) d'Air Lib sur Orly, n'a guère laissé d'espoir. Pour lui, la messe est dite. Le Cohor, qui dans sa redistribution des "slots" a privé la Côte de 7 liaisons quotidiennes Nice-Orly (Air Lib disposait de 11 liaisons et seules 4 liaisons ont été accordées à easyJet), ne compte pas revenir en arrière. L'organisme est indépendant et ses décisions sont irréversibles.En attendant, il faudra donc se contenter des trois liaisons Nice-Orly quotidiennes qu'easyJet ouvrira dès le 3 juin (la quatrième reste à confirmer), avec un prix à partir de 22 euros l'aller simple. Pas contente du tout, comme la CCI NCA, de la façon dont les "slots" ont été saupoudrés au plus grand bénéfice de la compagnie nationale, la "low cost" britannique envisage aussi une action auprès des instances européennes.Selon son porte-parole, Toby Nicol, easyJet estime en effet que "la redistribution des slots d'Air Lib n'a permis l'émergence d'aucun compétiteur sérieux pour Air France, qui détiendra cet été 52 % des créneaux horaires d'Orly. L'esprit de la concurrence, -c'est l'angle d'attaque d'easyJet-, aurait ainsi été complètement faussé à travers la répartition des "slots". Et easyJet d'essayer d'obtenir une décision européenne qui fasse jurisprudence pour ce type d'opération de redistribution massive de "slots".Un chemin européen qui n'est pas évidemment des plus rapides. Revenue sur sa ligne phare de Paris Orly presque au même point qu'avant le mouvement de libération de l'aérien en 1996, la Côte risque aussi de souffrir pendant quelque temps encore de ce brutal retour en arrière.

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