NicOx : le président d'Amcox démonte l'analyse de Goldman Sachs
C'était un véritable "coup de massue. NicOx, la biotech sophipolitaine avait été assommé le 12 août dernier par la publication du broker américain Goldman Sachs, valorisant le titre en bourse à 3,2 euros alors qu'il tournait juste en dessous des 10 euros. Depuis, c'est la dégringolade. La semaine dernière, le titre a perdu plus de 22% terminant la séance vendredi à 7 euros. L'annonce ce matin, lundi 25 août de l'arrêt du programme de développement sur l'Asie du PF -03187207, une autre molécule de NicOx pour le traitement du glaucome, risque de ne pas améliorer la situation.
En mai dernier, l'annonce de l'arrêt sur l'Europe et les Etats-Unis de ce programme lancé avec l'américain Pfizer avait levé la tempête sur le titre qui avait perdu près du quart de sa valeur dans la journée. Une étude menée chez des patients japonais avait cependant été poursuivie par Pfizer qui continuait à viser le marché asiatique. Le laboratoire américain partenaire a donc décidé d'abandonné aussi l'Asie au vu de résultats pas assez probants pour lui.
Concernant l'analyse de Goldman Sachs, si la direction de NicOx pour l'instant n'a pas véritablement répondu, l'Amcox, l'amicale des Coxien(ne)s qui organise sur le net un important forum entre actionnaires particuliers sur la société NicOx, a décidé de réagir. Dans une "réaction", à l'article de Sophianet.com, Olivier Guyonnet, président d'Amcox, livre ses arguments points par point et "les nombreuses et importantes inexactitudes" que contient l'étude selon Amcox. Voici sa réaction (les intertitres sont de la rédaction).
Une date choisie surprenante pour la diffusion de l'étude
"Une récente étude financière de Goldman Sachs suggère de prendre une position vendeuse sur le titre NicOx, considérant que les perspectives commerciales du naproxcinod, son composé en cours de phase 3 de développement clinique, ne seraient que de lordre de 530 M$ / an au pic de ses ventes.
La date choisie pour la diffusion de cette étude est surprenante, puisquelle se situe à environ un mois de la publication des très importants résultats de létude clinique 302, qui permettront en grande partie de valider le potentiel thérapeutique du naproxcinod.
Lanalyste de Goldman Sachs ne fait pas partie des analystes suivant régulièrement la valeur. Ceci explique sans doute que létude contienne de nombreuses et importantes inexactitudes, que lassociation des actionnaires particuliers de NicOx, AMCOX, souhaite publiquement relever :
1- Léchéance de la protection du brevet du naproxcinod alloue 8 années de ventes avant apparition de génériques, après un lancement commercial fin 2010 : selon lanalyste, cette durée ne permettrait pas de dégager une forte rentabilité sur la période, au regard des forts investissements marketing nécessaires pour un lancement sur ce marché de masse. Il en conclue que seul un laboratoire pharmaceutique de spécialité pourrait être intéressé par un partenariat commercial, ce qui impliquerait de modestes retombées financières pour NicOx, qui devrait réaliser une augmentation de capital en 2009 pour maintenir une position de force lors des négociations du deal.
Laffirmation de lanalyste selon laquelle un laboratoire de spécialité serait plus intéressé par le naproxcinod quune big pharma nest pas étayée. Il nest dailleurs pas certain quun deal avec une big pharma soit plus productif, en termes de ventes et rentabilité pour NicOx, que des partenariats avec des acteurs de moindre taille, mais mieux implantés sur leur zone. De plus, la commercialisation du naproxcinod devra saccompagner de celle dautres composés par le même réseau de visiteurs, afin den limiter les coûts : cet élément peut être central dans le choix du (ou des) partenaire(s).
Lhypothèse émise par lanalyse dune quasi absence de paiement upfront, qui devrait pourtant conforter la situation de trésorerie de NicOx en 2009, nest pas non plus étayée.
A propos de la différentiation avec le naproxène
2- Selon lanalyste, le naproxcinod naurait pas fait la démonstration dune réelle différentiation vis-à-vis du naproxène, particulièrement en matière deffet sur la tension artérielle. Certaines études démontreraient même quil augmente la tension. Il avance par ailleurs que la dispersion des mesures de tension effectuées lors des essais rend la valeur moyenne sujet à caution.
Les études auxquelles lanalyste fait référence ne visaient pas à évaluer les effets du naproxcinod sur la tension artérielle, mais ses effets gastro-intestinaux (études Hawkey & al, Lohmander & al), sur la fonction rénale (étude Huledal & al), ou sur la douleur (Schnitzer & al, 2005). La mesure de la tension artérielle ny faisait pas lobjet dune méthodologie stricte et reproductible, puisquelle ne faisait pas partie des critères principaux détude. Ainsi, par exemple, le délai entre ladministration du médicament et la prise de tension, nétait ni contrôlé, ni a fortiori reproductible dans létude Schnitzer. De plus, certaines (Hawkey, Lohmander) saccompagnaient dendoscopie de contrôle des effets gastro-intestinaux : or, il est clairement établi à ce jour que les endoscopies augmentent la pression sanguine et le rythme cardiaque (Yagi & al 2005, Ristikankare & al 2006, Mori & al 2008).
Ces études ne peuvent donc pas servir de référence à la comparaison des effets dun médicament sur la tension. Enfin, le nombre de patients était trop faible pour donner un caractère significatif à ces mesures de tension. Seule létude Lohmander portait sur une large population (970 p.), mais elle comportait un examen endoscopique systématique, ce qui la discrédite pour le critère de mesure de la pression sanguine. Lapproche adoptée par lanalyste nest donc en rien scientifique, puisquil tente dobtenir des données physiologiques comparatives à partir détudes nayant pas été menées dans ce but. Une telle approche disqualifierait gravement une société pharmaceutique vis-à-vis des autorités de régulation.
Quant à la dispersion des mesures, elle est inhérente à la nature humaine, et constatée dans toutes les études cliniques de composés thérapeutiques, y compris dantihypertenseurs. Cest pourquoi les groupes de patients soumis à ces études doivent être importants pour que la significativité statistique des résultats soit atteinte.
3- Lanalyste considère quune diminution de 2 mmHg de la tension artérielle versus naproxène na pas vraiment dintérêt clinique, et que ceci nintéresserait pas les autorités de régulation. Il est pourtant scientifiquement établi, au travers détudes épidémiologiques récentes, quune diminution même modeste de la pression artérielle moyenne aurait dimportants effets de réduction de la mortalité et de la morbidité, à léchelle dune population. Ainsi : - une réduction de 2 mmHg serait susceptible, sur la population générale des Etats-Unis, de réduire de 6% la mortalité pour attaque cardiaque, de 9% pour troubles coronariens, et de 7% toutes causes confondues. (Chobanian AV. & al, Hypertension 2003) - une diminution de 2,26% de la tension systolique (soit 3.1 mmHg pour une tension de 140) chez les 11,1 millions daméricains hypertendus conduirait à sauver de lordre de 86000 vies humaines et économiser 2,4 milliards de dollars de coûts médicaux directs (Grover & al, Hypertension 2005).
Laffirmation de lanalyste, selon laquelle une diminution de 2mmHg naurait pas dintérêt clinique et nintéresserait pas les autorités de régulation, nest pas étayée et relève donc de la pure allégation. Toutes les données disponibles plaident pour le contraire.
Un avertissement sur l'hypertension pour tous les génériques du naproxène
4- La notice du naproxène ne comporte pas davertissement sur le risque daugmentation de la tension. Depuis 2006, à la demande de la FDA, les notices de tous les génériques du naproxène comportent un avertissement sur le risque daugmentation de lhypertension. A titre dillustration, on pourra se référer à celle de NAPROSYN, le naproxène commercialisé par Roche, qui précise depuis le 24 janvier 2006 : « Hypertension : les anti-inflamatoires non stéroïdiens (NSAIDs), incluant le NAPROSYN, le EC-NAPROSYN, lANAPROX, lANAPROX DS, et le NAPROSYN Suspension, peuvent conduire à lapparition dune hypertension, ou laggravation dune hypertension préexistante, chacune pouvant contribuer à laugmentation de lincidence daccidents vasculaires cérébraux. ( ) Les NSAIDs, incluant le NAPROSYN, le EC-NAPROSYN, lANAPROX, lANAPROX DS, et le NAPROSYN, doivent être utilisés avec précaution chez les patients hypertendus. La pression sanguine doit être étroitement contrôlée dès le début du traitement et tout au long de la thérapie. » (traduction de langlais, à partir de la notice en accès public sur le site internet de la FDA).
Lanalyste semble méconnaitre ce point, fondamental pour le futur succès du naproxcinod.
La valeur "à la casse" de NicOx estimée par Amcox de 16 à 22 euros par action
5- Lanalyste pointe que le naproxcinod pourrait présenter des effets secondaires non établis à ce jour. Cest un fait qui touche tout nouveau médicament. A ce jour, aucun effet secondaire spécifique au naproxcinod ne semble avoir été observé. De plus, létude 301 plaiderait plutôt pour une réduction des effets secondaires, versus naproxène. Cette remarque est donc générique et de simple prudence. Ce ne peut être un argument de défiance.
Enfin, létude économique conduisant lanalyste à valoriser la société à 3 euros par action à lhorizon dun an est incompréhensible. Il na pas indiqué les hypothèses de calcul utilisées, de sorte que nous ne pouvons détecter doù viendrait lerreur.
Mais pour comprendre lincongruité de cette valorisation, il suffit de savoir que la propriété intellectuelle et les droits exclusifs mondiaux de commercialisation dun composé thérapeutique, ayant achevé son développement clinique, ont un « prix de marché » de 2 à 3 fois le chiffre daffaire escompté au pic des ventes. Ainsi, dans lhypothèse - défavorable à ses actionnaires où NicOx changerait radicalement de stratégie de développement, vendant purement et simplement lensemble de ses droits sur le naproxcinod en 2009, et sur la base de lestimation minimaliste de lanalyste (soit 530 M$ de C.A. au pic des ventes), la société pourrait en obtenir entre 1 et 1,5 milliard de $ (0,68 à 1 milliard deuros), soit 14 à 20 euros par action NicOx.
En comptant pour nulles les valeurs du capital humain, du capital intellectuel (hors naproxcinod) et des partenariats en cours, et avec une trésorerie de lordre de 100 Meuros, la « valeur à la casse » de NicOx en 2009 serait donc de 16 à 22 euros par action, soit 5 à 7 fois lestimation de lanalyste."
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