Regard franco-américain sur l'éducation: à l'heure de nos éternels voeux de Nouvel An...

Posté ven 19/12/2014 - 06:33
Par admin

Une année s'achève. Le temps des éternels vœux de Nouvel an est ouvert. Mais pouvons-nous changer? Sandrine et Maxime Crener posent la question dans la dernière chronique 2014 de leur "Regard franco-américain sur l'éducation". Tous deux admettent que l'opération est difficile. Bien sûr. Mais il existe peut-être une possibilité de combattre notre "Immunité au Changement". ..

Maxime Crener a dirigé le Ceram à Sophia et développé l'Université Internationale de Monaco. Son épouse, Sandrine, est Research Associate à la Harvard Business School. Tous deux, installés depuis cinq ans à Boston, ont gardé un pied sur la Côte d'Azur. Ils sont aussi souvent appelés par des amis azuréens ou monégasques inquiets pour l'avenir de leurs enfants. D'où l'idée de cette rubrique hebdomadaire sur les problèmes actuels de l'éducation avec un point de vue posé des deux côtés de l'Atlantique. En cette fin d'année, propice aux bonnes résolutions pour "l'an que ven", ils se sont penchés sur le changement. Pas celui de la société. Mais de soi-même. Avec là aussi, un regard sur ce qui se fait Outre-Atlantique. Voici leur 9ème "Regard franco-américain sur l'éducation" intulé "Pouvons-nous changer ? Nos éternels vœux de Nouvel An"

Pouvons-nous changer ? Nos éternels vœux de Nouvel An

"Et voilà l’année se termine, nous partons en voyage cette semaine et nous espérons vous retrouver en 2015, nos meilleurs vœux vous accompagnent! En fin d’année nous allons formuler comme beaucoup nos aspirations et espoirs de changement pour 2015. Pourtant, au fil des ans, nous avons appris que ces résolutions ne survivent pas le mois de Janvier!… C’est un fait incontestable : changer est très difficile. Mais il existe peut-être une possibilité de combattre notre "Immunité au Changement".

Nous avons attendu cette période de l’année pour vous faire découvrir une œuvre capitale dans le domaine de la psychologie des adultes*. Au cours d'une trentaine d’années de recherche deux professeurs de l’Université d’Harvard, Robert Kegan et Lisa Lahey, ont mis à jour un mécanisme caché qui nous empêche de mettre en oeuvre les changements désirés : arrêter de fumer, maigrir, déléguer, savoir dire non, etc...

Comprendre cette dynamique du refus inconscient de changer peut nous amener à mieux libérer notre potentiel. La démarche de Kegan se trouve expliquée dans le livre "Immunity to Change", publié en 2009 par Harvard Business Review Press et qui finalement va paraitre en Français (il faut remercier Marie-Claire Dagher pour ce merveilleux cadeau aux lecteurs francophones) aux Editions Colligence au début 2015. Cet ouvrage est, au fait, une nouvelle version du livre, “How the Way We Talk Can Change theWay We Work: Seven Languages for Transformation”, Jossey-Bass, San Francisco, 2001, améliorée par dix ans de recherches inédites et d’expérimentations nouvelles sur ce sujet passionnant qu’est le changement.

S’il est presque impossible de changer de façon permanente, c’est parce que des forces profondes s’opposent à notre volonté et quelles sont amplifiées par des croyances ("big assumptions"). Ces croyances cachées sont responsables de comportements contre-productifs qui aboutissent à une peur qui finalement empêche toute véritable action de changement. Surtout parce que la source de réticence est souvent invisible à nos yeux.

Dès lors pour Kegan et Lahey, notre immunité au changement est un équilibre logique entre notre volonté de changement et des croyances profondes qui nous incident à l'immobilisme. Pour arriver à changer il faut donc s’attaquer à ces "big assumptions" qui nous paralysent inconsciemment, et c'est justement ce que propose Kegan au travers de sa méthode. Dans l’environnement actuel fort complexe, il est essentiel de trouver des mécanismes simples permettant d’aider les individus à  dépasser leurs peurs inconscientes et apprendre autrement ; le processus d’immunité au changement et sa carte sont développés dans une approche de coaching que les auteurs ont mis en pratique depuis quelques années. **

Dans le cadre de cette courte rubrique nous présentons simplement la carte d’immunité, outil d’analyse causale vous permettant de cheminer au travers de quelques interrogations. La carte d’immunité est la première étape d’une prise de conscience face à notre problématique de transformation. Elle permet de manière très simple de mettre à jour ces croyances profondes qui nous paralysent. A titre d'exemple voici le tableau possible.

  • Dans la colonne 1 on trouvera la liste du point à améliorer ou des points à progresser sur lesquels on veut vraiment changer et qui sont possibles à réaliser.
  • Par après on remplit la colonne 2 avec toutes les actions que l’on fait ou ne fait pas et qui s’opposent à l’amélioration du point 1.
  • En troisième colonne (the WorryBox), il faut poser les risques encourus si nous faisons le contraire des actions de la colonne 2 et identifier les peurs qui sous-tendent les actions contre-productives (le ce que je crains en faisant ces obligations est en conflit avec mes buts).
  • Ainsi en colonne 4 il est possible de mettre en lumière « the Big Assumptions », les grandes croyances qui sous-tendent les actions de la colonne 3 et qui révèlent que notre comportement contre-productif demeure logique.
  • Dans la 5ème colonne on notera des idées pour tester la véracité des grandes croyances de la colonne 4.

C’est un exercice très personnel parce que les mêmes craintes sont dues à des grandes croyances très diverses selon les gens. La mise en œuvre de ce processus est au fait une technique de développement mental et en même temps un processus d’apprentissage. Comme le souligne les auteurs en découvrant ses croyances cachées la personne peut en prendre conscience et les observer. Au fait le cheminement sur cette carte se fait de façon itérative et nous oblige à mettre en lumière les motivations profondes qui nous empêchent de réellement changer.

Nous avons abordé dans cette courte note une toute petite partie de l’ouvrage mais nous y reviendrons dans quelques mois car il est fondamental dans la compréhension de soi-même et d'autrui ! Et cela demande beaucoup d’humilité ! Bonnes vacances à tous....

  • NB : Pour les adeptes de MOOC signalons que les Professeurs Kegan et Lahey ont le leur sur EdX, prochaine session en Février 2015 ! A ne pas manquer !
  • *La théorie du développement de l’adulte de Kegan (1982,1994) décrit et examine la manière dont l’adulte se développe et change pendant les étapes de sa vie. Cette théorie repose sur le constructivisme-développemental qui d’une part dit que le monde est celui que nous créons par nos découvertes et que d’autre part que l’humain  se développe et change à travers son existence
  • **Kegan et Lahey ont utilisé leur approche auprès de nombreux cadres et avec des organisations multiples au sein de leur société "Minds at Work".

Sandrine et Maxime Crener

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