Vicky Binet : son suicide reconnu comme accident du travail

Posté ven 13/06/2003 - 00:00
Par admin

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Alpes Maritimes a fait remonter l'accident à la date de mise en invalidité temporaire de Vicky, salariée d'Amadeus (photo Une avec son époux André), par le médecin du travail. Le décès est ainsi vu comme la conséquence d'un état dépressif.

"Je vous informe que l'accident du 30 septembre 2002 de Mme Victoriat Binet, fait l'objet d'une prise en charge dans le cadre de la législation relative aux risques professionnels. Le paiement des prestations éventuellement dues aux ayants droit interviendra dans les meilleurs délais...." : c'est dans ces termes que, dans une lettre envoyée à la famille, la CPAM des Alpes-Maritimes (Caisse Primaire d'Assurance Maladie), a annoncé qu'elle reconnaissait comme accident du travail le décès de Vicky Binet.Cette mère de famille, salariée d'Amadeus, s'était jetée le 25 janvier dernier du Pont de la Brague, à proximité des fenêtres de son entreprise. Le point final d'une sévère dépression qui tournait depuis des mois autour de son travail selon la lettre émouvante qui a été largement diffusée à sa demande par la famille. Un décès et une lettre qui ont profondément ému toute la communauté high tech et qui posent aujourd'hui le délicat problème de la frontière entre management d'une entreprise high tech et harcèlement moral (voir le dossier de SN.com "Management : l'affaire Vicky Binet").Un suicide reconnu comme accident du travail par une Caisse Primaire d'Assurance Maladie : le fait est très rare. D'autant plus que l'événement s'était déroulé hors du temps et du lieu de travail. "La CPAM a estimé que l'accident du travail n'est pas le suicide" note Me Mireille Damiano, l'un des avocats de la famille avec Me Chirez. "Elle a fait remonter l'accident au 30 septembre 2002, date à laquelle le médecin du travail a placé Vicky Binet en invalidité temporaire. Le décès, ainsi, a été considéré comme n'étant qu'une conséquence des des événements survenus auparavant." L'accident du travail n'est donc pas en fait le suicide, mais l'état dépressif lié au travail de Vicky Binet, état qui a conduit au suicide.Pour la famille, cette reconnaissance de l'accident du travail est un point marqué dans le combat qu'elle a engagé pour faire reconnaître la responsabilité de l'employeur dans le décès. Mais ce point n'est pas forcément déterminant sur le plan pénal. La plainte que la famille a déposée pour harcèlement moral reste pour l'instant en attente de qualification. Me Damiano, estime cependant que la décision de la CPAM n'en a pas moins la force du symbole : elle lie le suicide aux difficultés rencontrées dans le travail au sein de l'entreprise. La décision de la CPAM vient ainsi conforter la position de la famille qui cherche à faire reconnaître la faute inexcusable de l'employeur et le harcèlement moral.Cette position, l'entreprise la conteste formellement. La Direction d'Amadeus, qui a été elle aussi très sensible à ce drame et qui s'est efforcée de l'aborder avec beaucoup de pudeur, a fait établir une étude par une spécialiste de psychologie du travail. Une étude selon laquelle les causes du suicide sont à rechercher dans le parcours personnel de Vicky Binet et dans ces fractures intimes que chacun porte plus ou moins en lui.Management mal, dramatiquement vécu ? Harcèlement ? La reconnaissance du suicide comme accident du travail, établit bien un lien direct entre le décès et le cercle professionnel. Mais elle n'en tranche pas pour autant cette lancinante question .

Jean-Pierre  Largillet

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